L’Abandon

Par la porte entrebâillée de notre chambre, je distingue à peine les deux corps. Tous mes sens sont tendus à la recherche d’un signe, un bruit, une ombre. Petit à petit, ma vue s’adapte et maintenant je distingue nettement que l’homme est allongé au dessus d’une femme, ma femme !
Il a ses jambes de part et d’autre de celles de Chantal, qui les garde serrées. Ils sont nus tous les deux je pense. D’où je suis je ne vois pas le sexe de l‘homme mais je devine que dans cette position, il ne peut pas normalement la pénétrer. Pourtant son bassin ondule dans un lent mouvement de vagues. Ses fesses nues prouvent qu’il est bien nu et que sa bite doit se plaquer et se frotter contre la chatte de cette salope. Ces mots crus sont les seuls qui me viennent spontanément à l’esprit pour parler de l’être aimé. Je panique ! Se laissera-t-elle prendre ? Cette bite est-elle en elle ou bien l’homme se contente-t-il de la frotter contre son pubis ? Mon regard se fixe en cet endroit. Je veux savoir. Si elle se laisse pénétrer, tout ne sera plus comme avant. Je le sais.
Elle a passé ses bras autour du cou de son amant. Il a sa tête contre son épaule, pour autant, elle ne se laisse apparemment pas embrasser. Il tente bien de lui attr les lèvres mais à chaque fois elle esquive. En revanche, elle lui offre la chair chaude et douce de son cou. Ses cheveux noirs éclatés sur l’oreiller forment une couronne à son visage qui affiche une sérénité et de bonheur. Elle est resplendissante dans cette pénombre.
L’homme a glissé une main entre leurs corps et je devine qu’’il doit lui caresser le sein. Je ne vois pas son autre main, de l’autre côté, mais à l’inclinaison de son bras et de son épaule, j’en déduis qu’il doit lui caresser le sexe. Je panique ! En fait, je réalise qu’il doit plutôt tenter de conduire sa queue entre les lèvres sans doutes humides, de la femme. Putain ! Je le vois qui relève légèrement le bassin. Dans cette situation son gland ne peut pas ne pas être à l’entrée de la grotte d’amour de ma bien aimée, cette pute.

Il garde la pose. Illusion ? Je me mens pour ne pas voir la réalité. Ouf, je vois que Chantal resserre encore plus ses jambes. Elle se refuse. Le corps de l’homme s’effondre sur celui dessous, fatigué. Il recommence ses ondulations pour frotter sa bite contre le sexe offert, que je devine chaud comme la braise. Son bras que je ne peux pas voir est toujours en direction du ventre, tout contre. Un léger mouvement de son épaule me laisse à penser que sa main doit s’activer contre et même dedans la vulve qui doit être chaude et humide. Comme je la connais, quand elle m’aimait…
L’homme abandonne un instant le sein. Sa main se saisit de l’interrupteur de la lampe de chevet près de lui. Ma lampe de chevet ! Celle qui est du côté de notre lit que j’occupe habituellement. Car ils sont dans le lit conjugal, qui a été notre lit nuptial quand pour la première fois elle s’est offerte à moi, jeune épouse, la nuit de nos noces.
J’arrive à voir clairement que Chantal garde les yeux fermés. J’entends distinctement ses gémissements qui accompagnent une respiration courte. Elle prend du plaisir c’est sûr.
Alors elle prend dans ses deux mains le visage de son amant, l’écarte et plante son regard dans le sien, au dessus d’elle. Ses yeux brillent à la lumière de la lampe de chevet. Ses lèvres sont entrouvertes habitées d’un léger tremblement. La vision de l’expression affichée me fait l’effet d’un coup de poing au ventre. Je connais bien cette expression. Je ne la croyais que pour moi ! C’est l’expression de la femme amoureuse.
Ses yeux progressivement se couvrent de larmes et déjà certaines s‘écoulent sur les joues rouges de son visage crispé maintenant. Par deux fois elle incline à gauche puis à droite la tête en signe de refus. Elle veut lui dire « non », le supplie d’arrêter. Mais pour autant, elle reste collée à lui et je peux lire dans ce regard, un sentiment confus que je reconnais pour l’avoir si souvent intercepté, avant, quand on s’aimait. Regard amoureux qui me glace le sang.
Ses lèvres ne sont plus qu’à quelques millimètres de celles de son amant. Elle les maintient à distance. Mais je devine qu’elle résiste à la tentation de les lui abandonner. Ils doivent chacun sentir le souffle chaud de l’autre chargé de désir. Je ne vois pas le visage de cet homme qui continue inlassablement à se frotter contre le corps allongé sous lui.
Moi, je reste immobile, voyeur impuissant, qui regarde sa femme le quitter lentement, sans rien renter pour la garder. J’ai le sentiment de la voir mourir lentement dans mon cœur ! J’ai envie de pleurer tellement j’ai mal, tellement je souffre.
A nouveau les fesses du mâle se lèvent, puissantes, son bras se glisse plus loin entre leurs corps. La main a abandonné le sein pour se glisser derrière, sur ses reins, plus bas encore, juste au dessus des fesses, comme pour mieux la maîtriser, mieux la coller à lui. Il tente ainsi de vaincre la résistance des deux jambes serrées qui lui interdisent l’entrée du sexe féminin. Il la tire à lui, la fait se cambrer. Il sait ce salaud que de cette manière, le sexe s’avance et s’ouvre au devant de sa bite. Chantal grimace. A nouveau elle remue sa tête pour signifier son refus. Elle le regarde pourtant toujours droit dans les yeux mais son regard dit le contraire. Je panique ! Les larmes sont devenues abondantes, elle se retient d’éclater en sanglots. Les fesses lentement, inexorablement, s’abaissent. Le gland, je le devine décalotté, entre en contact avec les lèvres. Celles-ci ne souhaitent que le recevoir, le laisser pénétrer la vulve qui attend. Les muqueuses rosies de désir prennent la mesure de ce contact. Elles enregistrent à jamais la forme, le doux toucher, la chaleur de cette boule de feu. Le temps suspend son avancée. Moi, comme pétrifié, je mate ce moment assassin.
Une goutte de liquide séminal sourd au bout du gland et vient se mêler aux lymphes de la femelle et ce mélange comme la sève d’un arbre va remonter dans le vagin, imbibant les muqueuses rougies de sang à en exploser.
La liqueur fécondante afflue dans les organes de réserves de l’homme, prêtes à se déverser et déclencher bientôt la ponte de l’œuf qui signifie la vie à perpétuité des deux êtres qui s’accouplent.
Les muqueuses des deux amoureux sont excitées par des milliers de terminaisons nerveuses qui adressent aux deux corps des milliers de signaux de plaisir. Des frissons parcourent la peau, ondulants comme des vagues qui sans cesse caressent les plages.
Ils sont seuls, seuls à vivre cet instant magique où l’homme possède la femme qui se donne dans cette étreinte divine ou diabolique.
Soudain le visage de ma femme se crispe. Elle ferme les yeux alors que les fesses de l’homme montrent l’orientation idéale à l’introduction.
Le cul masculin reste immobile un instant, en suspend au dessus de sa proie. Chantal retient son souffle. Veut-il son accord ? Non, sûrement pas. C’est un baiseur prédateur, il recherche son seul plaisir, ignorant l’existence même de sa victime. C’est le coït pour le coït.
Brutalement, d’un coup, les fesses s’abattent sur elle, figées dans cette orientation qui ne laisse plus aucun doute sur la pénétration. J’imagine la queue qui s’enfonce d’un coup envahissant entièrement le vagin lubrifié. Chantal à cet instant pousse un petit cri et ouvre grand les yeux. Sa bouche cherche de l’air. Elle semble lui dire « pourquoi ? », mais bien vite, progressivement, elle laisse échapper des petits gémissements qui accompagnent la soumission totale à son amant. Et l’irréparable s’accomplit, véritable profanation du lieu sacré pour moi, par l’introduction de cette bite étrangère et diabolique dans son vagin. Je ne vois rien, mais les corps enlacés m’en montrent encore plus, alimenté par mon imagination. Mon monde s’effondre. Je l’ai perdue en cet instant si bref, si banal, d’un sexe qui en pénètre un autre. Ce n’est pas moi qui lui fais l’amour.
Maintenant l’amant a entrepris ses va et viens entre les cuisses qui lentement s’ouvrent, vaincues.
Chantal s’apprête à jouir, je le sais bien, moi qui l’ai fait jouir si souvent. Leurs bouches sont soudées et leurs langues se mêlent dans un baiser sans fin. Chantal lève ses jambes et entourent les reins de l’homme qui la besogne, pour mieux le sentir en elle et mieux lui signifier son abandon. Ses mains à lui ont quitté le ventre pour reprendre possession de la poitrine brillante de sueur. Cette poitrine à la peau si douce, aux tétons si beaux et vivants, réagissant au moindre frôlement, au moindre souffle. Très vite, trop vite, le rythme des mouvements des corps s’accélère, leurs bouches se séparent à la recherche d’un peu d’air et ensemble ils explosent dans un orgasme bruyant alors qu’il se vide en elle, leurs corps tendus, empreints d’une extase extrême.
Je n’arrive pas à détacher mon regard du couple qui vient de s’unir devant moi. Ma femme vient de se donner à un autre. Et sans protection ! Acte abominable s’il en est ! Avec toutes les conséquences que cela implique. Je me sens incapable de bouger. Ils restent collés l’un à l’autre, lui toujours planté en elle, pour contenir sa semence au fond du vagin, tout près des organes de procréation. Elle a gardé ses jambes serrées autour de ses hanches pour le retenir. Elle lui caresse la nuque, dans un geste de douceur affective. Il lui passe la main dans ses cheveux.
Les deux corps restent encore enlacés, intimement liés par le contact de leur peau, alors que lentement la liqueur déposée au fond du vagin envahit, gagne toutes les cellules vivantes jusqu’à leur âme. Je comprends la force de ce symbole, celui de la possession et de l’abandon. Ma femme se fond en lui, il la symbiose, la phagocytose. Au delà me du physique c’est l’esprit qui change de corps
Les minutes passent puis lentement il s’écarte pour venir s’allonger à ses côtés. La poitrine nue de Chantal est habitée de soubresauts. Sa respiration est saccadée. Elle ne pleure plus pourtant et c’est même un sourire plein de tendresse qu’elle lui adresse.

Mesure-t-elle l’étendue du désastre ? Réalise-t-elle ce qu’elle vient de faire ? Suis-je encore au centre de sa pensée. Ou bien craint-elle déjà de perdre celui qui vient de lui donner tant de plaisir ? Son amant, cet homme qui l’a séduite en une seule soirée. Cet homme à qui elle n’a pas résisté plus de quelques minutes avant de lui abandonner, pour l’effacer, tout le passé qui est le notre. Elle s’est laissée aller à sa propre jouissance et docilement s’est résolue à prendre le risque de se faire féconder par la virilité puissante de son amant de passage. Je suis détruit.
Un homme a pris possession de ma femme, déversant en elle sa semence. Ce symbole est extrêmement fort. Même s’il ne l’a pas fécondée, il l’a ensemencée. Le sperme, le germe qui est maintenant en elle, va coloniser toutes les cellules de son corps, jusqu’à son cœur, son esprit, son âme. Plus jamais elle ne pourra s’en délivrer, effacer ce « marquage » indélébile. Elle restera marquée jusqu’à la fin de sa vie. La pénétration est le premier stade de cette invasion. Quand le gland écarte les lèvres humides, ultime barrage à l’invasion, pénètre et avance, conquérant, dans la place forte, plus rien ne peut plus s’opposer à l’accomplissement de la catharsis.
Je trouve la force de m’éloigner en silence de cette chambre. Les questions me submergent.
Un coup de foudre si brutal ? Un moment d’égarement, vite oublié ? Le début d’une liaison adultérine ? En cet instant je ne sais plus si je l’aime encore. Et même si elle m’aime encore. Et c’est à mon tour de fondre en larme quand je monte dans mon auto pour fuir cet endroit de malheur : ce qui a été notre maison.
Je ne suis pas cocu, non !
Je suis seul, sans épouse, le cœur vide.

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